En août dernier, le procès de Sonos contre Google s’était soldé par une reconnaissance de 5 brevets de Sonos autour du multiroom : gestion du volume à travers le réseau, groupement des enceintes, processus d’installation initiale… Ce jugement a été définitivement validé cette semaine. Ce qui oblige Google à revoir le fonctionnement de son protocole Chromecast.
Petit historique : Sonos vs ses concurrents
En 2014, Sonos attaquait en justice Denon pour sa gamme HEOS jugée trop proche et utilisant des fonctionnalités brevetées par Sonos. Un procès qui s’est terminé quatre ans plus tard avec un accord sur l’utilisation de certains brevets Sonos par Denon. En 2020, Legrand signait un accord avec Sonos, pour l’usage de ces mêmes brevets afin d’éviter un procès.
Au même moment, Sonos s’est attaqué à Google. Les griefs étaient principalement les mêmes que lors du procès contre Denon. En gros, Sonos a inventé la musique via le réseau en multiroom et déposé tous les brevets spécifiques à cet usage.
Même si les fonctions semblent évidentes aujourd’hui, et que de nombreux fabricants les ont mises en place, il y a bien eu un pionnier. Sonos nous montre qu’ils ne resteront jamais inactifs devant l’utilisation volontaire ou involontaire de leurs brevets. C’est le jeu !
Sonos fait plier Google
Le 5 janvier dernier, le verdict a été confirmé : les 5 brevets principaux défendus par Sonos ont tous été confirmés. Google n’a plus le droit d’en utiliser les contenus et donc les fonctionnalités.
Voici ce qu’a déclaré le responsable juridique de Sonos :
Nous apprécions que l’ITC ait définitivement validé les cinq brevets Sonos en cause dans cette affaire et a statué sans équivoque que Google a enfreint les cinq. Il s’agit d’une victoire globale qui est extrêmement rare dans les affaires de brevets et qui souligne la force du vaste portefeuille de brevets de Sonos et la vacuité des refus de copie de Google. Ces brevets Sonos couvrent l’invention révolutionnaire de Sonos à propos des fonctionnalités audio domestiques extrêmement populaires, notamment la configuration pour contrôler les systèmes audio domestiques, la synchronisation de plusieurs enceintes, le contrôle indépendant du volume de différentes enceintes et le couplage stéréo des enceintes.
Il est possible que Google soit en mesure de dégrader ou d’éliminer les caractéristiques de ses produits d’une manière qui contourne l’interdiction d’importation imposée par l’ITC. Mais alors que Google peut sacrifier l’expérience du consommateur pour tenter de contourner cette interdiction d’importation, ses produits enfreindront toujours plusieurs dizaines d’autres brevets Sonos, ses méfaits persisteront et les dommages dus à Sonos continueront de s’accumuler. Alternativement, Google peut, comme d’autres entreprises l’ont déjà fait, payer une redevance équitable pour les technologies qu’elle a détournées.
Eddie Lazarus, Sonos Chief Legal Officer
La fin du contrôle de volume pour les groupes d’enceintes Google
Google a déjà publié un article sur son site communautaire concernant les changements : Upcoming Speaker Group changes. Cet article ne cite pas Sonos et justifie en introduction une décision judiciaire récente.
Certaines interdictions avaient déjà été anticipées dans le tout dernier Android 12. Le contrôle de volume depuis les touches du smartphone pour piloter un lecteur Chromecast audio avait été supprimé.
Google s’était engagé à le remettre, ce qui est le cas sur certains de ses smartphones Pixel depuis début janvier. A priori, même si l’utilisation semble quasiment identique d’un point de vue utilisateur, la technique derrière est différente pour ne pas contrevenir au jugement.
Parmi les autres modifications, l’ajout d’appareils audio dans l’app Google Home sera différente. Les appareils Google sont déjà à jour à ce sujet. Il se peut que des produits d’autres fabricants ne le soient pas. Il faut dans ce cas passer par une autre application (Device Utility App) pour effectuer l’appairage, le temps que ces produits reçoivent la mise à jour correspondante.
La fonction de groupement d’enceintes pour écouter la même musique dans plusieurs pièces reste d’actualité. Cela concerne autant les enceintes Google que le mix d’enceintes de plusieurs fabricants.
Cependant, le contrôle de volume groupé est supprimé. Il ne sera plus possible de gérer le volume d’un groupe d’enceintes, que ce soit dans l’app, vocalement ou avec les boutons de volume du smartphone. Vous devrez régler chaque enceinte du groupe individuellement.
C’est l’impact le plus important et sûrement le plus gênant. Pour l’instant, Google ne semble pas avoir prévu de contournement pour faire revenir cette fonction.
Différents points de vue
L’utilisateur Google peut se sentir floué et reprocher à Sonos de protéger des fonctions “banales” comme je l’ai lu dans différents commentaires. Il ne faut pas oublier qu’elles sont justement devenues banales grâce à Sonos qui les a inventées.
Du point de vue de Sonos, nul doute que la protection des brevets est une priorité sur un marché global aussi large. Sonos pourrait également refuser les royalties et tout simplement interdire que quiconque utilise ses fonctionnalités afin d’être unique sur le marché. C’est une stratégie risquée.
Quant à Google, il aurait été plus simple qu’ils arrivent à un accord en payant les royalties et en ne modifiant rien au fonctionnement de Chromecast. Ils ne l’ont pas fait. Alors j’imagine que les équipes de développeurs sont à pied d’œuvre pour proposer des fonctions identiques à Sonos sans contrevenir à leurs brevets.
A qui le tour ?
Sonos est en position de force grâce à ses brevets. D’autres concurrents contrevenants pourraient faire comme Legrand et payer des royalties pour éviter le procès. A moins que cela n’ait déjà été fait sans que nous soyons nécessairement au courant.
Mais je me pose une question primordiale : pourquoi Sonos n’a pas encore attaqué Apple pour AirPlay 2 ?
Les fonctions d’AirPlay 2 très largement implanté, comme le contrôle de volume de groupe, sont identiques à celles pour lesquelles Google Chromecast a perdu en justice. Je serais tenté de dire qu’Apple a bien pris soin d’étudier les brevets Sonos pour ne prendre aucun risque.
Si je liste les autres grands vendeurs d’enceintes et de systèmes multiroom dans le monde après Denon et Google (et JBL/Harman qui utilise Google Chromecast), il y a Bose et Yamaha. Nous saurons bientôt si ces deux-là ont également fait attention à ne violer aucun brevet ! Ou s’ils se sont déjà engagés dans le paiement de royalties.
Source : The Verge
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